1921, la vieille Communarde Nathalie Lemel vit, dans un dénuement extrêmes, ses derniers instants à l’hospice d’Ivry-sur-Seine. Elle a jadis rédigé, en Nouvelle-Calédonie, le premier jet de ses mémoires, puis les a dictés ensuite à un jeune aide-soignant. Ce dernier est fasciné, touché par cette petite ouvrière bretonne qui s’est consacrée tout entière à la défense de la cause ouvrière. Il va faire l’impossible pour retrouver les mémoires de son mentor, confisqués par une administration suspicieuse peu incline à la défendre. C’est que la pensée avant-gardiste de Nathalie Lemel inquiète toujours...
On croise dans le roman de Frédéric Ohlen toute une série de grands témoins : un Clemenceau obsédé par le Japon, un Monet presque aveugle... On est surtout happé par le récit à rebours de Nathalie Lemel, qui évoque tour à tour le petit peuple de Paris et des anciens camarades de lutte, comme Louise Michel, avec qui elle entretint une relation tumultueuse, ou bien encore Eugène Varlin, son amour fusillé.
La conscience fougueuse de la narratrice, sa pensée en archipel, le foisonnement des épisodes, les sauts constants dans le temps et l’espace, associés à la langue de Frédéric Ohlen construisent une œuvre chorale qui entraîne inexorablement le lecteur dans une lutte implacable pour faire triompher une vérité cachée : celle de ces femmes que n’a pas toujours retenue l’histoire officielle.